Le jeu des comparaisons auquel nous poussent les médias sociaux rend difficile d’y voir clair et à commencer par la réflexion autour de la notion de valeurs. Cet esprit de compétition qui est développé dès notre plus jeune âge, que ce soit par les jeux, l’école ou le sport, nous fait oublier que la vie n’est pas qu’une course, j’oserais même dire que la vie n’est pas une course.
Cet élan global auquel nous participons et que nous n’avons pourtant pas toujours sciemment choisi est organisé en quelque sorte contre nos intérêts. Si l’on part du principe que tout un chacun aspire au bonheur et que celui-ci procède d’une forme de sérénité ou de pleine satisfaction, alors à quoi bon participer à un jeu à somme nulle ? Je m’explique, la vision qui domine est celle où il y a des gagnants et des perdants, les gains sont compensés par des pertes et inversement. Dans une telle philosophie, il ne peut y avoir qu’une partie des participants qui puissent accéder au bonheur. Ce jeu généralisé est appelé la course au succès qui en fin de compte ne fait dépendre notre satisfaction que d’éléments extrinsèques et par définition ils nous échappent. Ainsi, en décidant d’y participer, nous nous exposons à une déconvenue alors même que nos efforts seraient au rendez-vous.
Certes, la vie peut être une compétition, mais faut-il pour autant que la compétition soit toute notre vie ? Il peut y avoir des bénéfices à se comparer, cela peut nous pousser à nous dépasser et à prendre exemple sur les autres pour apprendre. Le problème étant qu’aujourd’hui la compétition est devenue une obsession et qu’elle a remplacé la recherche de la vertu qu’on peut plus généralement nommer valeur. Ce n’est évidemment pas un phénomène nouveau, les philosophes du monde antique le déploraient tout autant.
Ce dont nous pouvons être sûrs, c’est que la recherche de la valeur apporte plus de satisfaction et même le bonheur en ce qu’elle repositionne l’attention sur nous-mêmes et non les autres. Le succès peut être l’aboutissement de la recherche de la valeur, cela dit cette dernière ne le garantit pas toujours. À l’inverse, la recherche du succès pour le succès éloigne presque à coup sûr de la vertu du simple fait que pour plaire ou gagner on est souvent encouragé à prendre des raccourcis et finalement à se corrompre.
Bien sûr, le succès est plus reluisant du simple fait qu’il se traduit généralement par une réussite matérielle. Il est bien plus facile de montrer son succès que sa valeur, c’est pourquoi dans ce monde de comparaisons, nous sommes davantage enclins à chercher le succès. La valeur n’apparaît au grand jour que dans les moments de crise, de danger, elle pourra même de ces situations prendre alors la forme de panache voire de gloire. Le reste du temps, la valeur est calme et silencieuse puisqu’elle se suffit à elle-même.