Les célébrités vous envient. Elles ne savent plus ce que c’est de déambuler anonymement sur un marché et de croiser le regard indifférent des badauds. Ils ont oublié ces vacances dans des lieux touristiques ou pas une personne ne les interpelle pour prendre une photo ni leur arrache un autographe. Certes, la célébrité a de nombreux avantages et sans doute bien plus que la vie d’une personne lambda, mais on sous-estime mal la valeur de l’anonymat alors que nous en jouissons tous à différents degrés sans le savoir.
L’anonymat est un luxe
Les entreprises de la tech gagnent leur vie en utilisant vos données personnelles. En échange, vous avez accès à des services gratuits. Être anonyme sur la toile revient à devoir payer ces mêmes services. Autrement dit, l’anonymat a un coût qui n’est pas à la portée de toutes les bourses.
Le problème de la nécessité de développer un « personal branding »
De plus en plus d’influenceurs en business nous enjoignent de développer notre marque personnelle. Ceci nous permettrait d’avoir un effet de levier sur les produits ou services que l’on veut promouvoir si l’on est un entrepreneur en ligne. [L’idée ici en filigrane est que nous sommes tous des entrepreneurs en puissance et que nous le serons tous bel et bien un jour tant le marché est disrupté constamment] Voici un exemple emblématique et à grande échelle de l’effet de levier par le personal branding : les voitures Tesla ne se seraient jamais aussi bien vendues si elles n’avaient pas été ostensiblement associées à la marque personnelle Elon Musk. Si un illustre inconnu avait été à la tête de la firme, sans doute les actions de la compagnie ne se seraient jamais envolées.
Le problème du personal branding est qu’il s’impose frontalement à la recherche d’anonymat
La recherche de richesse est l’anonymat semblent antinomiques
Devant les premiers arguments avancés, on comprend bien pourquoi il est compliqué d’aspirer à la richesse tout en désirant garder l’anonymat. Hormis certains cas, par exemple celui de personnes qui disposent de compétences rares et qui peuvent travailler dans l’ombre comme salariées d’une entreprise qui souhaitent garder jalousement ses meilleurs éléments (en échange de gros salaires), le reste des personnes est plus ou moins contraint de se mettre en scène, de communiquer sur leurs compétences et faire avancer leur carrière.
L’anonymat, une denrée rare si vous êtes riches
Si vous habitez dans un pays en développement, il est possible que vous ne soyez pas ou peu connecté. L’anonymat est plus accessible quand on n’est pas connecté à internet. Plus vous gagnez de l’argent, plus vos données personnelles ont de la valeur. Ceci explique de manière caricaturale pourquoi les paparazzi pouvaient gagner leur vie en vendant des clichés (de données) de célébrités alors qu’il s’agissait souvent d’informations anodines (la star fait ses courses, va à la plage, promène ses enfants). Plus vos revenus sont grands plus les gens s’intéressent à vous et donc à vos données personnelles.
Un meilleur partage de la richesse pourrait atténuer le problème
Essentiellement, ce qui pousse des entreprises à s’intéresser à vous, c’est parce que vous pouvez leur acheter des produits et services. Mieux ils vous connaissent, mieux ils pourront vous amadouer pour que vous cédiez à leurs offres commerciales. Une solution évidente serait de diluer le risque en répartissant l’attention des entreprises prospectrices. On ne peut pas faire diminuer leur effort mais on pourra faire en sorte à ce qu’ils ne les concentrent pas en un groupe limité de gens. Ce sont les techniques du banc de poissons : un poisson a plus de chances de survivre face à un prédateur s’il est noyé dans un groupe que s’il est tout seul. Le problème est qu‘on souhaite presque toujours gagner plus, ce qui les pousse à vouloir faire cavalier seul et donc perdre plus facilement leur anonymat.