Ce que les réseaux sociaux ont permis, c’est de démocratiser l’accès à la célébrité. Ce faisant, ils ont changé notre rapport à notre personne. Ainsi, nous ne sommes plus tout à fait l’individu que nous étions au quotidien, mais nous sommes aussi un être virtuel, a fortiori public. En quoi cela peut-il devenir un problème ?
La nécessité de vouloir plaire constamment
Le problème de cette microcélébrité, c’est qu’elle peut modifier notre rapport à l’authenticité. On est authentique lorsqu’on s’exprime et agit de telle sorte que nous exprimons ce que nous sommes sans vraiment tenir compte des conséquences. Bien sûr, on ne peut pas être 100% authentique tout le temps. La vie professionnelle nous oblige quelque peu à mettre notre authenticité de côté de façon à ne pas froisser les susceptibilités (et accessoirement conserver notre travail). Jusqu’alors, la vie privée était le royaume de l’authenticité. Que ce soit avec nos amis ou notre famille, l’authenticité était de mise en ce qu’elle a toujours constitué une valeur cardinale des relations de qualité. Or, depuis l’avènement des réseaux sociaux, nous disposons de moins de temps privé, notre vie publique se poursuit dans des espaces temporels qui étaient jusqu’alors réservés au privé.
La disparition du privé
Si nos données personnelles sont de moins en moins privées, notre temps est de moins en moins consacré à l’intime. Les frontières entre le public et le privé se brouillent du fait de l’intrusion des médias sociaux dans nos vies. Nous avons allègrement ouvert les portes de nos jardins secrets en succombant à l’envie de plaire tantôt à des amis mais le plus souvent à des admirateurs anonymes sur la toile.
La disparition de la sacralité du temps oisif
Ce qui est gênant avec la notion de l’audimat intime, c’est qu’elle nous pousse à rentabiliser, à monétiser des moments de notre journée qui jusqu’alors relevaient de notre intimité et même pourrait-on dire d’une forme de sacralité. Le sacré par définition ne se marchande pas autrement, il relève du profane. Lorsque toute notre journée est une source d’optimisation marchande (notre travail par définition relève d’une activité pécuniaire), nous devenons un être désacralisé, nous avons réduit notre être à la forme la plus basique de matérialisme.
Le danger de la désacralisation
Nous ne sommes pas seulement un être fait de chair et de sang ou encore une simple entité émotionnelle ou intellectuelle. Nous sommes bien plus que ça, nous sommes un être spirituel. Lorsque nous n’abordons la vie que sous l’angle du profit, on amenuise la place qu’occupe le spirituel dans nos vies. Notre âme est négligée et l’on en vient à ressentir une douleur spirituelle. Les souffrances de l’âme peuvent prendre diverses formes.
Les souffrances de l’âme
Lorsqu’on néglige notre âme, on peut observer des manifestations en tous genres de comportements nocifs. Les addictions, l’excès de travail, les accès de violence, le manque de sérénité etc. sont autant de symptômes qui peuvent témoigner d’une négligence de l’âme. L’âme a besoin d’avoir un espace dans votre vie. C’est un peu comme votre partenaire dans une relation de couple, si vous la négligez, il est fort probable que cela génère des conflits qui vous rendent malheureux. Votre âme est une entité que vous ne pouvez pas ignorer, au risque de mener une existence misérable.
La concurrence avec des personnes fictives : vers la fin de la microcélébrité
Plus le temps passe, plus on se rend compte des prouesses réalisées par les IA. Pour le moment nous ne sommes en majorité pas prêts à suivre des chaînes totalement animées par des personnes fictives créées par des IA. Ce n’est qu’une question de temps pour que cela change car les nouvelles générations seront, elles, davantage prêtes à le faire. De ce fait, progressivement, les personnes réelles vont entrer en compétition avec des personnes fictives jusqu’à ne plus pouvoir rivaliser en matière de productivité. À terme, les IA proposeront des contenus de sans cesse meilleure qualité, qui correspondront davantage aux attentes des téléspectateurs jusqu’à éclipser la majorité de l’offre traditionnelle, du moins pour ce qui relève de la microcélébrité. Devant cette concurrence quelque peu déloyale, les gens s’arrêteront tout bonnement de produire du contenu et recommenceront peut-être une plus en phase avec ce qu’elle était auparavant. À moins qu’ils sous-traitent eux-mêmes la création de leurs propres contenus via l’utilisation d’IA qui reproduiront leur visage et qui pourrons créer de manière quasi infinie.
La saturation du marché détruira la viabilité de la plupart des microcélébrités
Tout marché dont l’offre devient saturée perd mécaniquement de la valeur. En inondant un marché d’un produit, on le rend gratuit et insignifiant. Les IA vont détruire les business models existants en matière de microcélébrités, celles-ci perdront très logiquement leur intérêt mercantile et de notoriété. Peut-être à terme, on peut imaginer que l’intérêt pour les chaînes YouTube ou les comptes d’influenceurs d’autres réseaux sociaux va décroître jusqu’à disparaître. Ce sera un peu comme la boulimie des périodes de fêtes de fin d’année qui nous conduit à ne plus vouloir consommer rien de gras pendant plusieurs mois. La profusion de contenus aura peut-être cet effet, il annihilera toute volonté de consommer du divertissement sur internet.